le jeune homme et la mort
La lumière traverse la maison de part en part.
Bien que les vitres ne soient jamais très propres, la double barrière des baies demeure pour les oiseaux un leurre fatal.
Celui-ci s'est tué ce matin, en plein vol, victime de la transparence, de l'illusion de ses sens.
Le bruit de l'impact m'a fait sursauter et l'irruption incongrue de la mort , m'a ramenée, moi l'athée libre penseuse , au « Vanité, tout est vanité » de l'Ecclésiaste, et à la colombe poignardée d'Apollinaire « Douces figures poignardées, chères lèvres fleuries... »
Pour un peu, j'aurais aimé que mon petit-fils fût là pour procéder à un enterrement comme aiment à en faire les enfants.
L. qui a passé l'âge des rites puérils n'a pas voulu pour autant que je jette le corps à la poubelle. "On ne peut considérer ce joli corps comme un déchet " a-t-il argué. Peu contrariante, je l'ai laissé coucher l'oiseau sous une plante. Il l'a toutefois auparavant copieusement photographié car restent en lui , je le vois bien, des traces d'adolescence et cette fascination romantique pour le mystère de la mort.