IL PLEUT
1964 : Barbara sort un nouvel album où elle interprète ses textes .
La pochette du vinyle est blanche, barrée par les tiges de deux roses rouges soulignant le nom de la chanteuse.
Au-dessous, les titres en majuscules, noirs : Nantes apparaît complètement à droite juste au dessous de Pierre.
Il pleut depuis deux jours sans discontinuer et ces deux chansons me reviennent en mémoire :
deux chansons de pluie.
La première sur la mort du père incestueux déchirant l'espace et le temps , un crachin gris et tenace.
La deuxième sur la plénitude de l'amour. Des mots simples (mais dieu que la simplicité reste difficile !) et qui en quelques touches discrètes (ou indiscrètes) nous font pénétrer dans l' intimité d'un couple.
Le toit à réparer, le bois à rentrer, des gestes banals et la présence masculine, solide dans toute cette liquidité, d'un Pierre bien prénommé qui emplit toute l'attente de la maison et de la femme. Le dehors, le dedans...
Michel Portal, au saxo, la voix de Barbara tantôt brûlure, tantôt caresse. Un long frisson.
Une chanson éminemment érotique que les autorités de l'époque n'ont même pas songé à censurer !
Il pleut,
Sur les jardins alanguis,
Sur les roses de la nuit,
Il pleut des larmes de pluie,
Il pleut,
Et j'entends le clapotis,
Du bassin qui se remplit,
Oh mon Dieu, que c'est joli,
La pluie,
Quand Pierre rentrera,
Il faut que je lui dise,
Que le toit de la remise,
A fui,
Il faut qu'il rentre du bois,
Car il commence à faire froid,
Ici,
Oh, Pierre,
Mon Pierre,
Sur la campagne endormie,
Le silence et puis un cri,
Ce n'est rien, un oiseau de la nuit,
Qui fuit,
Que c'est beau cette pénombre,
Le ciel, le feu et l'ombre,
Qui se glisse jusqu'à moi,
Sans bruit,
Une odeur de foin coupé,
Monte de la terre mouillée,
Une auto descend l'allée,
C'est lui,
Oh, Pierre,
Pierre...